Allier: c'est quoi, l'agro-écologie ?

Explications et exemple de cette nouvelle pratique avec Hubert Degrange, exploitant céréalier à Lusigny, mis en avant jeudi dernier lors d'une journée dédiée par la Chambre d'agriculture à l'agro-écologie.

« Lorsque j’ai repris l’exploitation de mon père en 1997, j’ai commencé par… planter quelques arbres, sur les bords des cultures. »

Ce n’était que le premier acte d’Hubert Degrange, céréalier à Lusigny. Un premier essai symbolique, transformé près de vingt ans plus tard par un ensemble d’actions que l’on peut rassembler sous un nom : l’agro-écologie. Derrière l'expression, un objectif : mieux allier performance économique, environnementale et sociale. Un programme et un ensemble d'actions qui vont de la recherche à la formation des agriculteurs en passant par de nouvelles techniques de production.

L'agro-écologie sur le papier

L'agro-écologie regroupe tout un patchwork de mesures : la formation des agriculteurs sur les nouvelles pratiques, le développement du biologique, la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires et des antibiotiques, l'encouragement à la transition et à l'expérimentation collective via les groupements d’intérêt économique et environnemental (GIEE). Un plan agroécologique a été lancé en ce sens en 2012 par le ministère de l'agriculteur.

L'agro-écologie sur le terrain

S’il a commencé par la plantation de haies, Hubert Degrange a ensuite mis en place un système d’irrigation sur l’ensemble de l’exploitation, puis des jachères constituées d’un mélange de semences, qui favorisent le développement de la faune sauvage. De plus, des panneaux photovoltaïques dominent le domaine, sur l’un des bâtiments de l’exploitation.

Dernière conséquence de cette nouvelle orientation, le choix de ses cultures. La parcelle était habituellement partagée entre le blé et l’orge depuis plus de quarante ans, le maïs s’est ajouté à la rotation.

Autant de changements qui ne sont qu’une partie des outils possibles pour être « agro-écologique » : « Je ne suis pas un exemple, mais je représente une évolution d’une exploitation, parmi tant d’autres » assure Hubert Degrange.

Hubert Degrange est membre du réseau de fermes Dephy, dédié depuis 2009 à la démonstration et à l’expérimentation de systèmes économes en produits phytosanitaires. Dephy a été lancé dans le cadre du Plan Écophyto avec un objectif de - 50 % de recours aux produits phytosanitaires, en dix ans, sur toute la France. Les résultats n’ont pas vraiment suivi, puisque l’indice mis en place par le plan pour observer l’utilisation de ces produits a augmenté de 5 % entre 2008 et 2013. C’est pourquoi le plan Écophyto 2, en 2015, a fixé de nouveaux objectifs : - 25 % à l’horizon 2020, en optimisant les techniques actuelles expérimentées par les exploitations volontaires?; puis -25 % à l’horizon 2025, par le biais de mutations plus profondes.


Bourges: des initiatives de transition


Marie Marcat, connue pour son jardin de Neuilly-en-Sancerre, confie conseils et secrets pour obtenir un jardin épanoui.
Permaculture, agroécologie, agriculture biologique… Trois techniques agricoles complémentaires. La culture biologique recouvre le nombre le plus large de pratiques. Cultiver en bio veut simplement dire ne pas utiliser d'intrants (produits phytosanitaires – fertilisants et pesticides – issus de la pétrochimie). Or, bon nombre d'agriculteurs en bio utilisent les mêmes techniques de travail qu'en agriculture conventionnelle : cultures de plein champs, travail intensif du sol, terre dénudée, peu de biodiversité, beaucoup de mécanisation…

L'agroécologie, indépendamment du travail sans intrant, utilise les techniques de compostage, la recherche de complémentarité entre les espèces, intègre l'ensemble des paramètres de gestion écologique tels que l'utilisation modérée de l'eau, la lutte contre l'érosion, le reboisement…

Relier tous les éléments d'un système les uns avec les autres
La permaculture n'est pas à proprement parler un système agricole ni une branche radicale de l'agroécologie ! Cette pratique repose sur trois principes éthiques inspirés du fonctionnement de la nature : prendre soin de la Terre, prendre soin des hommes, partager équitablement les ressources. Contrairement à une idée trop répandue, la permaculture n'est ni un ensemble de techniques de jardinage, ni un savoir-faire basé uniquement sur la « culture sur butte » ; un processus parmi d'autres permettant d'augmenter la surface cultivable, de travailler sans se baisser, de multiplier les microclimats aux différentes zones, ensoleillées ou plus humides…

Cette démarche associe l'ensemble des bonnes pratiques de l'agriculture biologique et de l'agroécologie aux énergies renouvelables et à l'éco-construction.

L'esprit de la permaculture est de relier tous les éléments d'un système les uns avec les autres, y compris les êtres humains. À titre d'exemple, dans un éco-système géré en permaculture, il n'y a pas de production de déchets « exportables » car chaque élément est utile aux autres.

Permaculture et agroécologie partagent les mêmes idées d'écosystèmes résilients, appuyés sur une vision globale et sur l'utilisation intelligente et mesurée des ressources locales, pour le plus grand bénéfice des êtres humains.

La permaculture est donc une démarche holistique et philosophique, une éthique de vie qui cherche à créer plus de diversité et d'interdépendance afin d'assurer santé, efficacité et résistance à chacune des composantes, et au système intégral.

Dans les années 1970, deux Australiens, Mollison et Holmgren, participent à l'émergence de la conscience écologiste. Ils font un constat simple : l'agriculture industrielle menace la biodiversité et la fertilité des sols. Il est temps de créer et de développer d'autres systèmes agricoles stables et endurants. Ils publient, en 1978, Perma-Culture1, concept signifiant alors « agriculture permanente », pour ensuite devenir « culture permanente », dans le sens de durable.

À la ferme du Bec-Hellouin, en Normandie, une équipe motivée crée une méthode de maraîchage novatrice, synthèse de plusieurs influences : concepts de l'agro-écologie et de la permaculture ; travaux de Coleman et expériences de John Jeavons, pionniers de l'agriculture biologique aux États-Unis ; héritage des anciens maraîchers parisiens réalisant jusqu'à huit rotations de culture par an ; agriculture jardinée du Japon et de Corée ; et pour finir, agriculture biologique contemporaine.

La méthode de la ferme du Bec-Hellouin en Normandie
Cette nouvelle voie est appelée « méthode de la ferme du Bec-Hellouin » (*). De nombreux agronomes visitent la ferme et constatent un niveau de production particulièrement intensif et une amélioration de l'état du sol (aggradation). Ils décident alors que l'expérience mérite d'être scientifiquement validée et modélisée, d'où un projet de recherche mené par l'Inra en 2011 et intitulé « Maraîchage biologique permaculturel et performance économique » d'une durée de quatre ans. Selon cette étude, « 1.000 mètres carrés cultivés en maraîchage bio permaculturel permettent de créer une activité à temps plein. »

À la ferme du Bec-Hellouin, les buttes de terre noire débordent de verdure : les plantes amies se retrouvent côte à côte, celles qui ont besoin d'ombre se déploient à l'abri du feuillage… Quelles plantes sont les plus adaptées au relief ? Comment faire pour récupérer au mieux les eaux de pluie ? Et pourquoi pas des toilettes sèches, pour produire du compost ? Plus loin, une petite mare bordée de fleurs et un hôtel à insectes invitent les alliés du jardin à se sédentariser. Chaque élément se retrouve à la place la plus judicieuse, afin qu'il n'y ait ni gaspillage ni perte d'énergie.

Aujourd'hui, les formations en permaculture se multiplient et d'autres recherches sont menées pour prouver le potentiel et l'efficacité d'un point de vue économique et agronomique de telles structures. La permaculture n'est pas réservée aux alternatifs qui vivent en communauté au fin fond des Cévennes…. Il y a aujourd'hui des centaines « d'initiatives de transition » à travers le monde et c'est tant mieux !

(*) Pour en savoir plus : www.fermedubec.com.

Pratique. Le Jardin de Marie,
à Neuilly-en-Sancerre, est fermé pour l'hiver. Réouverture le 29 avril 2017.


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